Forum de l'univers du huis clos

Fredou a écrit : J'ai connu des jeux en Rhône Alpes où la bière pression à volonté était prévue dans la PAF. Du coup, plus les joueurs buvaient, plus ils rentabilisaient leur jeu.

J'ai connu les mêmes. C'est purement rhétorique, mais je l'affirme : il n'y aurait pas eu d'Agonie du Poète sans ces jeux-là.



Après, pour essayer d'être un peu plus constructif : interdire davantage en GN que dans la vraie vie m'exaspère, très vite et très fort. Déjà, parce que je ne fais pas du GN comme une version édulcorée et hygiéniste de la vraie vie, en attendant des garanties sur le produit fini et sur MON idée de comment ça doit se passer. Parce que je ne sépare pas le GN de la vraie vie. Le temps et l'espace d'un GN sont spéciaux, suspendus, exceptionnels, mais le GN reste dans le champ de la vraie vie. Je ne m'achète pas une tranche de vie meilleure quand je m'inscris à un GN, je ne cherche pas à filtrer, trier, sélectionner, déterminer, encadrer, censurer, interdire, ni même juger le projet proposé, mais au contraire à m'ouvrir aux autres, de l'orga-chef au joueur anonyme que je ne croiserais peut-être même pas, sans à priori, sans préjugé.

Les gens sont comme ils sont, et en GN plutôt mieux que dans la vraie vie, parce qu'on partage déjà, à priori, un goût commun pour une activité relativement exigeante. Personnellement je laisse le bénéfice du doute aux rares joueurs bourrés que je croise, rien n'empêchant jamais de prendre quelques instants pour désamorcer une situation vraiment pourrie plutôt que de bouder dans son coin et pester contre les fêtards excessifs, sans rien proposer d'autre que d'interdire collectivement.

L'interdiction par défaut c'est la faillite de l'intelligence, de la tolérance et de la responsabilité.

Je vous jure, ça me hérisse de lire ce sujet (pas sur le point précis de l'alcool, mais généralement, sur l'espèce de méfiance diffuse et insidieuse, envers l'autre, différent, incorrect, incongru, qui serpente à travers les différents propos exprimés, et je l'écris sans agressivité ni reproche). Et ce n'est pas mieux quand surgissent des comparaisons avec le prix de la viande et de la salade. Je ne fais du GN pour en avoir pour mon argent au moment du buffet. J'ai parfois l'impression d'un micro-trottoir dans une maison de retraite médicalisée pour vieux riches sur la Côte d'Azur...

Je suis peut-être idéaliste, mais je veux croire que les gens qui s'inscrivent à un GN sont conscients que la bonne réussite du moment dépend avant tout d'eux-mêmes. Et donc, qu'ils se comporteront d'une façon responsable, y compris jusque dans leurs éventuels excès. Je reste convaincu que s'adresser aux gens comme à des personnes responsables, intelligentes et sensibles demeure la meilleure manière de faire en sorte qu'ils se hissent à la hauteur de ces qualités. Et s'ils n'y parviennent pas tous, ni tout le temps, au moins auront-ils essayé, dans la bienveillance et la convivialité.

Quelques expériences:

GN steampunk jura suisse, il y a quelques années: bonne bière à volonté, pas vu de gens bourrés (livret de règles rappelait de pas abuser sur la bouteille sous peine de se faire sortir). Bar à absinthe partiellement payant, pareil. C'était mon lieu préféré du GN, ne serait-ce que pour la déco, le rituel, la lumière. Bref convivialité + ambiance en jeu = win.

GN méd-fan jura suisse, asso différente: bière obtenable avec de l'argent de jeu. Les joueurs des persos pauvres en jeu qui veulent boire et se mettent à braquer les gens, voire les buter en jeu juste pour leur faire les poches: système pourri qui donne des scènes débiles. Notre groupe avait apporté sa propre tireuse, donc l'argent de jeu servait à autre chose (composante alchimiques etc).

Conquest of Mythodea: consos alcoolisées à vendre comme le reste (bonnes bières, cocktails divers et variés dans les bars le soir): quelques mecs bourrés et/ou éteints mais sur un mass larp à 7000 on les remarque à peine.

GN Battlestar Galactica il y a 10 jours: pas d'alcool sur site à cause du réglement du musée-destroyer, mais plein de persos avec des fiasques, pleines de café, flotte etc qui roleplayent l'alcool. Plein de bocaux d'alcool de contrebande qui circulent en jeu, fabriqué par l'équipage du vaisseau. Les bocaux contenaient un espèce de vinaigre blanc et un truc au gingembre, le roleplay de dégoût n'était pas difficile. Honnêtement vu le niveau de froid, fatigue et immersion, l'alcool on s'en foutait.

Huis clos steampunk de vendredi dernier, même asso qu'au début: jeu dans un bar, en public, une petit verre de champ' inclus, le reste des consos à payer hors jeu (la PAF de 8 euros incluait l'entrée à une conv de jeu de 3 jours). J'ai tourné au rhum-coca toute la soirée donc c'est sans doute mieux pour les finances du GN d'avoir fonctionné comme ça.

Bref, y a plein de combinaisons qui marchent, et effectivement faire un minimum confiance au gens en les briefant dans le matos de jeu c'est aussi possible.

Re-bref: comme Bross quoi.

Je vois mes joueurs comme des invités. En venant sur mon jeu, ils entrent chez moi, dans mon jardin épicurien, dans ma vie, dans mon imaginaire. Et de la même manière qu'on attend d'un invité à diner qu'il se comporte convenablement à table, j'attends de mes joueurs qu'ils s'en tiennent au comportement attendu durant leur séjour. S'il n'y a pas de confiance réciproque possible, ça n'irait nul part. Le comportement avec l'alcool entre totalement dans ce contrat épicurien.

Sur le jeu, je prévois de l'alcool mais en quantité raisonnable.

En fait, en tant que joueur, je gère généralement l'alcool comme les règles ou l'ambiance du jeu me le dictent. Différemment si c'est un bon gros camping médiéval ou bien s'il s'agit d'une murder fouillée à l'époque de la prohibition.

Cette marge de manœuvre est décidée par l'organisation (de manière explicite ou implicite). Je m'en informe et je m'y conforme. Mais si on y sert de l'alcool à volonté, on ne peut dans un même temps reprocher aux gens de boire. Juste de trop boire.

Après, comme pour la drogue, il y a des gens qui sont dépendants. Des gens incapables de jouer et de prendre du plaisir, sans avoir bu ou fumé. C'est dommage, mais c'est ainsi. Je ne les blâme pas tant qu'ils sont maîtres d'eux-même et qu'ils incarnent leurs personnages. Le reste ce sont des cas individuels et des situations exceptionnelles, qu'aucune interdiction ne réglera.