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Re: Parlons ciné - La vie d'adèle

Posté : mer. 4 déc. 2013 23:27
par Lila
Leïla a écrit :C'est une question intéressante, mais je pense qu'on est toutes les deux d'accord pour dire qu'on peut aimer et remettre en question. Si là, on aime le produit fini (j'ai adoré ce film qui m'a profondément touché), ça ne veut pas dire qu'on cautionne les méthodes. Excuser ce serait dire, en tout connaissance des faits (que j'estime être loin d'avoir) : il faudrait laisser Kechiche refaire la même chose, exactement pareil, en traitant son équipe de la même manière, parce que le résultat vaut cette souffrance.
Tu as raison. Mais justement, y a-t-il des gens qui pensent que ça vaut la peine ?
EDIT : ce que je voulais dire en fait, c'est que moi, savoir ça, ça m'a coupé mon plaisir de spectatrice, parce que je savais que les "belles" scènes avaient été accouchées dans la souffrance (et des actrices, et des techniciens).

Re: Parlons ciné - La vie d'adèle

Posté : mer. 4 déc. 2013 23:39
par Gilles
L'abandon de soi, le fameux lâcher prise est un cheminement personnel. Sinon, autant revenir aux bûchers et à la Question (au sens torture pour faire advenir un 'sublime' instant de vérité)... see what I mean?

Et pour cette raison (violence du tournage etc.) je n'ai pas été voir ce film. Pour ne pas cautionner. Il y a d'autres beautés.

Re: Parlons ciné - La vie d'adèle

Posté : mer. 4 déc. 2013 23:59
par Lila
Et quand tu dis on peut aimer et remettre en question, Leila, je pense que ça dépend en fait. S'il s'agit d'idées, à la limite je peux tolérer (même si ça me gâche une partie de mon plaisir)(ex : les BD Blacksad qui véhiculent des clichés assez sexistes) je veux dire ce ne sont que des personnages de papiers après tout (et les personnages, par essence, sont toujours consentants). Mais là on parle d'actes, sur de vrais humains, du coup pour moi on est quand même un cran au-dessus. Donc quand Baptiste dit "elles seraient mortes pour moi ça serait pareil", ça me choque un peu.

Quand j'ai vu la vie d'Adèle (je n'étais pas au courant de l'ampleur de la violence du réal, mais quand même un petit peu), je me suis demandée si j'aurais préféré le voir "vierge". Mais en fait je pense que j'aurais eu un rejet a posteriori, comme je l'avais eu pour un spectacle que j'avais trouvé beau, et dont j'ai été mise au courant des conditions de production après coup.

Re: Parlons ciné - La vie d'adèle

Posté : jeu. 5 déc. 2013 09:44
par Baptiste
Je crois que je suis insensible à la question.
Parce que les conditions de travail des acteurs français me laissent indifférent. C'est pas germinal. Elle n’était pas à la rue si elle refusait ou si elles arrêtaient. Et j'ai du mal à juger sur leur témoignage uniquement. Filmer quelqu'un en train de vomir pour réussir un film, c'est pas la fin du monde et si c'est le prix d'un plan formidable, je l'accepterai en tant que réal comme en tant qu'acteur.

Re: Parlons ciné - La vie d'adèle

Posté : jeu. 5 déc. 2013 10:03
par lucieXperience
Je n'ai pas vu "La vie d'Adèle" parce que le film dure 3h et que j'ai un problème avec les films longs, mais j'avais quand même envie d'aller le voir. Je n'avais pas du tout entendu parler de ça (je ne connais pas le réalisateur). Et bien même en le sachant, ça ne m'empêchera pas de voir le film et de le juger en faisant abstraction du contexte. Le contexte c'est important, mais pas suffisant pour juger une oeuvre.

ça me fait un peu penser au point de vue de Sainte Beuve sur l'impossible dissociation d'une oeuvre et de son auteur. À ce titre on ne pourrait pas apprécier Céline parce qu'il est antisémite. C'est un point de vue très personnel qui dépend de la sensibilité de chacun face à certaines questions. Personnellement, l'antisémitisme de Céline ne m'empêche pas d'apprécier sa littérature. Pourtant j'ai détesté Nadja d'André Breton parce qu'à l'époque j'ai eu l'impression que Breton avait profité de la faiblesse de Nadja pour faire son oeuvre et l'avait jetée ensuite dans un asile comme une vieille merde.

Re: Parlons ciné - La vie d'adèle

Posté : jeu. 5 déc. 2013 10:30
par Thanos
Après, si les méthodes te dérangent vraiment, le mieux c'est de ne pas aller voir le film, parce que s'il fait des millions d'entrés, c'est ça qui valide la méthode et poussera peut-être le réalisateur à refaire la même chose la prochaine.

Re: Parlons ciné - La vie d'adèle

Posté : jeu. 5 déc. 2013 10:49
par fenriss
Baptiste a écrit :. Elle n’était pas à la rue si elle refusait ou si elles arrêtaient.
Bah c'est un métier, donc il y a un contrat et si l'actrice avait refusé de jouer le jeu je suppose qu'elle aurait pu se faire virer, il y aurait eu des conséquences pour sa carrière.

Re: Parlons ciné - La vie d'adèle

Posté : jeu. 5 déc. 2013 10:59
par lucieXperience
fenriss a écrit : Bah c'est un métier, donc il y a un contrat et si l'actrice avait refusé de jouer le jeu je suppose qu'elle aurait pu se faire virer, il y aurait eu des conséquences pour sa carrière.
Ouais, mais alors comme tout boulot : si tu ne te défends pas, si tu penses que ton boulot mérite que tu restes victime, alors on ne va pas te plaindre.
Des employés qui se font exploiter par des connards il y en a quantité. Il y a aussi quantité de gens qui font des heures sup' gratos et qui croient que s'ils ne le font pas ils vont perdre leur job. C'est faux. Le pouvoir n'est pas forcément là où on le croit. Et quand bien même tu te fais virer ; est-ce que ton bonheur et ton épanouissement personnel ne sont pas le plus important dans l'histoire ?

Re: Parlons ciné - La vie d'adèle

Posté : jeu. 5 déc. 2013 11:27
par Gilles
Le sujet dérive un peu sur le monde du travail là.
L'analyse du pourquoi-comment les gens restent dans des situations inconfortables voire douloureuses est assez compliquée et multifactorielle. Mais c'est souvent moins simple qu'il n'y parait. Cela dit, l'une des meilleures façon d'obtenir de quelqu'un qu'il reste et soit soumis c'est de lui dire qu'il est libre de s'en aller.

[quote=la soumission librement consentie Joule Beauvois]La technique du « mais vous êtes libre de »
Il a été récemment montré, qu’en en appelant explicitement au sentiment de liberté, on pouvait amener les gens à faire ce qu’ils n’auraient pas fait d’eux-mêmes. A titre d’exemple, le recours à la technique du « mais vous êtes libre de » a permis à des chercheurs de multiplier par 4 leur chance de se voir offrir de l’argent par un inconnu. La technique est pourtant d’une simplicité enfantine. Après avoir formulé une requête donnée (ici : “ Excusez-moi, auriez-vous un peu de monnaie pour prendre le bus ? ”), on utilise une formule comme : “ Mais vous êtes libre d'accepter ou de refuser. ” Et dans cette recherche, les donateurs se montrèrent plutôt généreux puisqu’ils donnèrent une somme correspondant à peu près au prix d'un ticket de bus, deux fois plus que les personnes sollicitées sans qu’ait été utilisée la technique du « mais vous êtes libre de ».
[/quote]

Re: Parlons ciné - La vie d'adèle

Posté : jeu. 5 déc. 2013 11:47
par fenriss
lucieXperience a écrit :
fenriss a écrit :si tu penses que ton boulot mérite que tu restes victime, alors on ne va pas te plaindre.
J'ai pas dit qu'elle ne pouvait pas se plaindre, juste que SI, elle pouvait se retrouver à la rue.