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Re: QM59 : Mauvais comédien

Posté : mer. 5 déc. 2012 11:12
par lucieXperience
Sur le jeepform que nous avons écrit et fait jouer à la Nuit du Huis Clos et aux GNiales, c'est assez frappant de voir à quel point les joueurs ont naturellement tendance à ne pas s'écouter, et à quel point ça demande de l'exercice et de la discipline de le faire. Apparemment, sur la session des GNiales (à laquelle je n'étais pas) il n'y a pas eu d'écoute malgré les consignes plusieurs fois répétées.
Donc oui des exercices de ce type en atelier sont je pense indispensables pour que les joueurs essayent d'y penser en jeu, mais il en faut beaucoup pour que ça devienne réellement un automatisme.

Re: QM59 : Mauvais comédien

Posté : mer. 5 déc. 2012 12:26
par Baptiste
dire qu'il n'ya pas eu d'écoute c'est exagéré. Mais il suffit qu'un ou deux joueurs n'arrive pas à se plier à l'exercice pour se retrouver avec un chaos sans nom ^^

ce qui est amusant cela dit.

Re: QM59 : Mauvais comédien

Posté : mer. 5 déc. 2012 12:38
par Pascal
Oui, ça avait un coté amusant mais pour ceux qui voulaient respecter les consignes pour jouer le jeu de cette expérience, c'était pénible.

Re: QM59 : Mauvais comédien

Posté : mer. 5 déc. 2012 14:26
par Thanos
En même temps, ce constat n'est pas vrai que pour le GN. Ca l'est aussi dans la vraie vie de tous les jours. Perso, je ne suis pas du genre à parler fort, de façon volubile ou à couper la parole des personnes en train de parler. Du coup, c'est super difficile pour moi de me faire entendre. Que ce soit en vrai ou en GN du coup.
Et donc, au final, sur ce point là, la plupart du temps, les gens sont en GN comme ils sont dans la vie.

Re: QM59 : Mauvais comédien

Posté : mer. 5 déc. 2012 15:50
par Sly
Je vous rassure, même les improvisateurs ont des pbs d'écoute. C'est un travail de longue haleine où il faut rester toujours à l'affût. Ceci dit, les improvisateurs sont rarement très nombreux à jouer ensemble car c'est connu, plus on est nombreux, plus l'écoute est difficile.

Re: QM59 : Mauvais comédien

Posté : jeu. 6 déc. 2012 07:49
par Fredou
Pour comparer ce qui est comparable, il me semble qu'en théâtre d'improvisation l'écoute est primordiale pour deux raisons majeurs :
- Parce que les joueurs inventent du contexte au fur et à mesure, il est nécessaire de ne rien laisser passer pour l'intégrer pleinement (d'autant que l'environnement, non représenté, nécessite une forte abstraction).
- Parce que le résultat se veut un spectacle qui doit être lisible pour le public.

En GN (mais certains peuvent sans doute y être plus sensible que d'autres, Jeep, etc), c'est quand même un peu différent. Si l'écoute n'a clairement rien d'inutile, à mon humble avis, elle n'a quand même pas la même priorité qu'en impro. Je la vois au milieu de bien d'autres aspects comme le respect de la logique du contexte et du personnage, de la liberté de jeu, etc, sans qu'ils lui soient sacrifiables. Si quelqu'un me coupe la parole, ne m'écoute pas, avant tout, c'est une action de jeu (pas moins légitime qu'elle le serait dans la vie), à laquelle je vais décider de réagir en conséquence.

Re: QM59 : Mauvais comédien

Posté : jeu. 6 déc. 2012 10:30
par Pascal
C'est juste. Ca fait une vraie différence. Couper la parole d'un autre est néfaste au théâtre d'impro alors que ça peut être considéré comme une action de jeu en GN.

Mais est-ce toujours le cas ? Pour une fois ou un personnage coupe la parole d'un autre pour une raison justifiée et "en jeu", combien de fois est-ce le joueur qui est simplement en totale absence d'écoute ?

Sur le Bonheur des Dames j'ai introduit un atelier "d'échauffement à l'écoute", dont l'idée est de faire expérimenter aux joueurs les effets de prendre son temps, d'écouter l'autre attentivement, de marquer une pause avant de répondre.

L'envie d'intégrer ce genre de travail à mes GN me vient de Baptiste et de l'atelier d'impro présenté par Jo Dirninger aux GNiales (rendons à César ce qui appartient à César). Les deux font du théâtre d'impro et arrivent à la même conclusion : il n'y a pas assez d'écoute en GN. Déformation issue de l'activité impro ou constat éclairé ?

Je pense que c'est un vrai sujet, qui mérite d'être exploré. Il y a peut-être là un moyen d'entrer dans une dimension de jeu plus intense.

Re: QM59 : Mauvais comédien

Posté : jeu. 6 déc. 2012 11:18
par kilourh
C'est d'autant plus vrai pour un jeep form qui s'inspire pas mal de l'impro, non ?

Re: QM59 : Mauvais comédien

Posté : jeu. 6 déc. 2012 12:53
par Thomas B.
kilourh a écrit :C'est d'autant plus vrai pour un jeep form qui s'inspire pas mal de l'impro, non ?
Tout à fait. Sur un GN normal un manque d'écoute te fait rater une occasion de faire une chouette scène et frustre potentiellement un autre joueur. Sur un jeep, ça peut te foutre tout le jeu en l'air.

Sur le jeep anglophone des GNiales 2012 (The kick inside je crois) je ne sais pas si on s'est bien écoutés mais la structure jouait avec ça: des fois on jouait seulement un petit groupe à la fois puis le groupe suivant, parfois on était en parallèle et c'était fait exprès, parfois on pouvait choisir d'être plus "récepteur" qu'"émetteur".

Il y a eu des moments de bordel mais globalement comme c'est un jeu basé sur des couples, forcément ça simplifie les rapports.

Re: QM59 : Mauvais comédien

Posté : jeu. 6 déc. 2012 15:11
par Bross
Je ne peux pas émettre de jugement sur la compétence de chacun en interprétation dramatique, qui reste quelque chose de très flou, de très subjectif, et au sujet de laquelle personne n'a véritablement de légitimité pour se prononcer. Même pas un acteur professionnel, dans la mesure où, effectivement, le GN a ses propres besoins en matière de lisibilité / visibilité du jeu d'acteur des uns par les autres, qui sont différents du théâtre, du cinéma, de l'impro, etc...

Je rejoins évidemment un premier avis exprimé plus haut, au sujet des gens qui ne jouent pas. C'est effectivement insupportable. Mais ça mérite aussi d'être nuancé : par exemple, quelqu'un qui ne joue pas, au sens qui ne parvient pas par son interprétation à rendre son personnage visible par les autres joueurs, mais qui respecte l'esprit du personnage et vit le jeu avec intensité, composera aussi, d'une certaine manière, un personnage crédible. Au temps pour le personnage, et c'est dommage s'il était bien écrit, mais après tout, pourquoi pas : il me paraît pertinent et générateur de jeu qu'un joueur, fasse réellement vivre son personnage, se l'approprie et le déforme (toujours sans le trahir), quitte à échapper à la vision de l'auteur.

A l'inverse, quelqu'un qui interprète correctement son personnage, d'un point de vue de sa technique dramatique, mais qui vit le jeu en touriste, ne s'implique pas, ne transmet pas d'intensité, de surprise, ou simplement cabotine, peut faire illusion, mais finalement n'apporte pas grand chose au jeu.

Je crois vraiment que la clé est là, et répond à l'autre point soulevé, celui de l'écoute : un joueur "grande gueule" super créatif avec 3 idées à la seconde, mais qui ne sait pas écouter, est brouillon, et peu contributif, finalement. Car il ne considère pas son apport possible de façon critique, dans une création collective. Il s'épate tout seul de ses propres idées, et les impose dans le champ d'expression sans chercher à voir comment sa créativité peut trouver un écho avec celle d'autrui, aboutir à une vraie synergie. Personnellement, ce joueur-là, même s'il peut apparaître comme un "moteur" du jeu, me gonfle. J'ai vraiment l'impression d'être bousculé, d'être contraint, de voir mon jeu altéré, par pression ou par rejet du jeu de l'autre, alors que nous devrions jouer de concert. Ce joueur n'écoute que lui, et je ne peux même pas l'écouter, car il est assourdissant.

Ce n'est pas une question de couper la parole ou pas, qui est en effet une action de jeu, qui est déjà, paradoxalement, une "proposition à jouer". Pour oser une comparaison avec les sports collectifs, le joueur bruyant c'est le joueur "perso", qui fonce tout seul au but, pour la gloire, avec ce que ça implique de désorganisation derrière, de dissension dans le groupe, etc... plutôt que de suivre un plan de jeu en équipe et de régulièrement proposer des actions à ses partenaires.

C'est aussi vrai pour le joueur "Silent Bob", qui est clairement un spectateur aux premières loges, tout particulièrement quand il vous regarde avec un sourire béat parce qu'il en prend plein les yeux, au lieu de réagir et jouer. Touriste. Passif. Mignon, mais sans intérêt. Pour le coup, dans CE cas de figure, je suis emmerdé de n'avoir rien à écouter...

Je rejoins totalement l'idée que le GN manque de qualité dans l'écoute, ceci incluant également la qualité d'émission. Je pense même que c'est une donnée totalement intégrée (parfois inconsciemment) par beaucoup d'organisateurs, qui identifient des joueurs moteurs (bruyants) et des joueurs suiveurs (silencieux), et castent en fonction. C'est vraiment une erreur, voire une trahison du principe même du GN. Burno citait sur un autre forum la spécificité du GN comme "média de narration multiple, immédiate et partagée", nous sommes précisément dans cette problématique. Trop souvent, par manque d'écoute (aussi par manque de matériau structurant mais c'est un autre débat), le GN ressemble à un cadavre exquis, sans cohérence, sans message, sans tension dramatique. Il ne raconte rien, et on n'y croit plus, même si ça peut parfois être amusant quand même, pour le divertissement.

Cela dit, traiter l'écoute, via des workshops, ne me paraît même pas suffisant à régler ce problème. Il y a des jeux sans workshop qui fonctionnent très bien, parce qu'ils sont bien dimensionnés, distribués, castés, écrits, etc... et dictent (parfois tacitement) un ensemble de règles de bonne conduite et de bonne interprétation qui rendent dispensable une écoute active. Il suffit alors de se laisser "porter" par le jeu. Ce qui demeure dommage ce sont les joueurs bruyants ou silencieux qui gâchent un peu le jeu même quand il est bien écrit. Si on peut parler de mauvais acteurs, c'est peut-être eux qui sont à viser. Pour eux, à la rigueur, de la formation à l'écoute ce serait pertinent. Mais j'ai de gros doutes sur la capacité réelle de gens qui sont (parfois volontairement) sourds au projet proposé à devenir soudainement capable d'écoute...

Reste le casting, pour filtrer...après tout, ce n'est pas QUE choisir la bonne adéquation rôle/joueur, c'est aussi pour dégager les neuneus, un vrai casting de cinéma/théâtre...