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QM172 - Un joueur peut-il trop jouer ?

Posté : lun. 8 juin 2015 13:20
par Cire de Sacub
Il y a 20 ans nous attendions fébrilement LE jeu de l'année : en été, c'était la plupart du temps un GN médiéval fantastique en pleine nature. La communauté étant naissante en France, nous devions fabriquer armes, armures et équipement. Un jeu demandait un investissement fréquemment chronophage.

Puis les jeux se sont multipliés tout au long de l'année. Mieux, les thématiques se sont enfin mises à varier. La finesse des psychologies des rôles à interpréter s'est nettement accrue surtout dans les petits formats (Huis-Clos).

Peu à peu, certains joueurs passionnés se sont mis à jouer autant que possible. La préparation matérielle s'est facilitée (même si cela demeure un véritable budget). J'ai des proches qui se sont mis à jouer jusqu'à une ou deux fois par mois !

Beaucoup de jeux "nécessitent" peu "d'investissement psychique" de la part du joueur (ce n'est pas pour autant qu'il va peu s'y investir). Mais de plus en plus de formats demandent un réel investissement émotionnel chez le joueur (ce n'est pas pour autant qu'il va réellement s'y investir).

Un musicien ou un acteur de théâtre qui se produit tous les soirs n'est parfois plus animé par le "feu sacré". Il peut reconnaitre (même s'il est un peu tabou de le reconnaître pour ne pas faire fuir le public...) que dans ces conditions de répétitivité, son propos perd en "vibrations émotionnelles". Certes même les joueurs les plus furieux ne jouent pas quotidiennement. Mais la durée d'un jeu huis-clos excède, généralement, très largement les deux ou trois heures d'un spectacle.

Plus un joueur joue, plus il développe des compétences, de l'expérience. Peut-être même des aptitudes spécifiques encore peu ou mal identifiées ?

D'où ma question.

Un joueur participant à des GN/huis clos à fortes charges émotionnelles doit-il limiter sa pratique ? A force d'abréactions répétées, son jeu ne va t-il pas perdre en "vibrations"/intensité émotionnelle ? Peut-il développer des compétences ou aptitudes pour intensifier son jeu sans ou peu d'investissement émotionnel ?

Re: QM172 - Un joueur peut-il trop jouer ?

Posté : lun. 8 juin 2015 14:21
par Fredou
Je joue 15 jeux par an en moyenne depuis 20 ans. A part les deux premières années, j'ai très vite pris ce rythme de croisière, avec une pique d'une vingtaine une année. Je crois que j'ai dû en jouer dans les 300.

J'enchaine souvent plusieurs jeux à la suite, sans que cela me pose le moindre problème. Si les jeux sont bons, je marche et les émotions prennent, c'est sans rapport avec le nombre de jeux joués sur la période ou le temps de préparation. Vivant toujours au présent, un jeu n'est jamais pour moi que le plaisir d'un instant. Dès lors qu'il est passé, et même s'il gardera toujours une place dans mon cœur, il y a à nouveau de la place pour de nouveaux instants, de nouveaux plaisirs, donc de nouveaux jeux.

J'ai même souvent constater un effet totalement contraire à ce que tu sous-entends. C'est à dire qu'il y a parfois chez des gens qui jouent peu une attente beaucoup "trop importante". Le jeu devient porteur de tout leur espoir, comme si sa "réussite" était le symbole de leur "réussite personnelle de l'année". L'enjeu devient alors bien plus grand que le seul plaisir de l'instant. Ce genre d'attitude génère souvent des effets bleeds (manque de fairplay dans les jeux compétitifs, obsessions du type à jouer avant le jeu, à ne plus pouvoir décrocher après, etc).

Re: QM172 - Un joueur peut-il trop jouer ?

Posté : lun. 8 juin 2015 15:15
par Magali
Je pense que, comme vous le dites un peu tous les deux, il y a plein de trucs qui entrent en jeu et qui font que… ça dépend des joueurs ! :lol:

Donc oui, je pense qu'un joueur peut "trop" jouer, mais que le "trop" est variable selon les personnes, et qu'il faut apprendre à se connaître pour savoir respecter sa limite. Pour moi par exemple, je déteste faire deux jeux deux semaines de suite (pour des raisons d'investissement émotionnel, et aussi de fatigue physique) et je l'évite autant que possible.

Je n'aime pas avoir deux jeux à "préparer" en même temps. J'ai du mal à penser à deux persos en même temps et j'ai besoin de temps pour m'approprier le perso, et surtout pour apprendre le trombi parce que j'ai une très mauvaise mémoire des noms (et je ne suis pas du tout physionomiste donc je retiens très mal les persos des joueurs que je ne connais pas en vrai). Et j'ai aussi besoin de temps pour évacuer le bleed-out. J'utilise ce mot exprès après avoir expliqué que je ne le comprenais pas :mrgreen: mais en gros, après un GN, je n'ai pas ENVIE de m'impliquer dans un autre, je veux rester encore un peu avec mon perso dans la tête (ça me fait exactement pareil quand je termine un livre qui m'a beaucoup plu, en général j'ai beaucoup de mal à en recommencer un autre juste après).
Tout ça fait que mon rythme idéal est un mois d'écart au minimum entre deux GN (que ce soit en tant que joueuse ou autre chose). Je le sais par expérience et je ne le respecte pas vraiment parce qu'il y a clairement des "saisons" de GN au printemps et à l'automne et qu'on fait ce qu'on peut avec les jeux qui nous intéressent et où on peut avoir des places. Mais j'ai aussi appris à me dire que ce n'est pas grave si je ne joue pas tout de suite tous les GN qui m'intéressent et à ne pas m'inscrire si je sens que je ne vais pas pouvoir avoir l'implication que je voudrais. Alors qu'il y a quelques années, je m'inscrivais à tous les jeux qui me tentaient au cas où ça marche…

Bref, il faut apprendre à se connaître…

Re: QM172 - Un joueur peut-il trop jouer ?

Posté : lun. 8 juin 2015 16:11
par Lila
"Trop" par rapport à qui ?

Trop pour lui ? (épuisement physique ou émotionnel) Pour les autres ? (il appauvrirait son jeu et la qualité de son interaction) Pour l'association ? (toujours jouer avec les mêmes personnes)

Qu'est-ce que tu entends par "investissement psychique" (et émotionnel, tant qu'on y est ?)

Je joue assez peu. Parce que peu de jeux m'intéressent vraiment, ou alors pas au point d'y investir du temps et de l'argent.

Je dirai par an le max pour moi :
- LaboGN
- 2 GN d'un week-end
- 1 GN de quelques heures tous les deux mois

Re: QM172 - Un joueur peut-il trop jouer ?

Posté : lun. 8 juin 2015 18:49
par Thomas B.
Ca dépend des gens :)

J'ai un peu trop tiré sur la corde en 2013 (un événement par mois en moyenne, et souvent en tant qu'orga).
J'en parle là: http://www.thomasbe.com/2013/12/08/peak ... rp-events/" onclick="window.open(this.href);return false;

Mon souci n'a pas été l'implication émotionnelle dans mes personnages, mais juste le trop plein d'activité: joueur, orga et beaucoup d'activités de documentation et débat à l'international, que ce soit en ligne ou en physique. Rien que ces dernières ont de quoi te blinder un emploi du temps si elles sont faites correctement :). Et ne parlons pas du boulot, de la vie sentimentale etc en parallèle.

Je me souviens que ne pas avoir le temps d'écrire un debrief de certains jeux me manquait un peu, j'aimais bien faire ça avant de passer à un autre jeu. Et j'ai fini l'année vraiment crevé. Mais le plaisir de jouer a toujours été là, et la qualité au rendez-vous vu les retours des participants. La qualité de la com' internet était moins top.

En 2014 j'ai commencé à freiner, avec seulement 8 événements, et tant que simple participant: 5 GN et 3 conventions et j'ai fermé la partie anglophone de mon blog. Ne pas être orga et ne pas devoir gérer l'internet anglophone fait du bien niveau fatigue, et le plaisir de jouer était toujours là. Les jeux "à émotions" en étaient chargés, les autres moins, et c'est comme ça que j'aime le GN: varié. Le mélo c'est cool mais un bon film d'action de temps en temps aussi.

En 2015 je continue à réduire tout simplement parce qu'il y a moins de projets qui me bottent, surtout dans la région, et que j'ai fait le tour d'un certain nombres d'événements internationaux comme Conquest of Mythodea (mais snif ils ont annulé De la bête). J'ai arrêté les réseaux sociaux ce qui me laisse plus de temps libre pour faire d'autres trucs que le GN (slam, écriture etc). Le plaisir de jouer est toujours là, et je ne pense pas avoir développé de compétences particulières dans mon approche des jeux. Je choisis plus ceux auquel je participe, ils doivent avoir quelque chose de différent, de nouveau, un thème ou des participants que j'adore.

Bref honnêtement, tant qu'il y a une période de récupération entre chaque événement et que les impératifs hors-GN (travail, famille, patr... euh non pas ça) sont respectés, je ne vois pas où est le problème.

Re: QM172 - Un joueur peut-il trop jouer ?

Posté : mar. 9 juin 2015 11:03
par Pink
Peut-il développer des compétences ou aptitudes pour intensifier son jeu sans ou peu d'investissement émotionnel ?

J'en suis persuadé. Pour le versant ludique du monde du GN, ce n'est pas quelque chose de trés habituel, mais je pense que les apports du monde du théatre l'ont bien démontré. Sans aucune connaissance sur le sujet, je dirais juste que Lila sur l'atelier qu'elle a proposé à différentes GNiales arrive à intensifier le jeu des participants sans leur demander de s'impliquer émotionnellement.

Aprés je pense que les jeux qui nécessitent vraiment un investissement émotionnel fort, voir extréme, ne sont pas vraiment légion chaque année.

Re: QM172 - Un joueur peut-il trop jouer ?

Posté : mar. 9 juin 2015 13:29
par Cire de Sacub
Impressionné par le rythme de jeu de Frédou ! Il est vrai que le jeu annuel "trop" attendu peu créer de regrettables effets secondaires. Je l'ai également constaté. Mais je le rencontre de moins en moins.
Je ne met nullement en doute la validité de ce rythme de jeu. De plus les GN étant variés, cela apporte de fait des "respirations".

Je me sens très proche de la position de Magali.

@Lila : tes questions sont judicieuses ; trop par rapport à tous ! pour le joueur et les autres. Par investissement psychique j'entends l'investissement émotionnel et au delà.

J'ai été impressionné par le blog de Thomas dans la langue de Shakespeare... Un évènement par mois en orga ?! je suis admiratif... je crois que nerveusement je ne supporterai pas un tel rythme... J'aurais du poser la question "Un orga peut-il trop organiser ?" !

Merci Pink d'avoir traité cette dimension de la question. Ce que je ne parviens à déterminer et identifier clairement : quelles sont justement ces compétences ou ces techniques permettant un rythme de jeu important tout en donnant ce volume de jeu ? Lila ?

Re: QM172 - Un joueur peut-il trop jouer ?

Posté : mar. 9 juin 2015 14:31
par Lila
Pink a écrit :Aprés je pense que les jeux qui nécessitent vraiment un investissement émotionnel fort, voir extréme, ne sont pas vraiment légion chaque année.
La vérité.

Ce que tu dis sur mon atelier est un ressenti personnel, je ne l'ai pensé comme ayant cet effet (ou alors je m'en rappelle plus), qu'est-ce qui t'a fait penser ça ?

Re: QM172 - Un joueur peut-il trop jouer ?

Posté : mar. 9 juin 2015 14:41
par lucieXperience
Lila a écrit : Ce que tu dis sur mon atelier est un ressenti personnel, je ne l'ai pensé comme ayant cet effet (ou alors je m'en rappelle plus), qu'est-ce qui t'a fait penser ça ?
ça fait un petit moment que je l'ai fait, mais je suis tout à fait d'accord avec Pink : ce sont des exercices qui demandent de se poser des questions sur le personnage, avec un regard extérieur, en aucun cas de se mettre à la place de lui pour ressentir ce qu'il ressent.
Je pense que tu as oublié... :roll:

Re: QM172 - Un joueur peut-il trop jouer ?

Posté : mar. 9 juin 2015 14:59
par Fredou
Impressionné par le rythme de jeu de Frédou !
Et encore, je n'en cherche jamais, je me ménage en refusant quelques uns, en ne m'inscrivant vraiment qu'à ceux qui me tentent, et en en loupant d'autres parce que les dates se chevauchent. (La saisonnalité fait que c'est très dense au printemps et à l'automne. L'hiver et l'été sont plus calme).
Dans mon cas, c'est aussi lié à des choix de vie : pas d'enfant, une vision très libre et indépendante du couple, une philosophie hédoniste appliquée à mes passions.